S’il y a bien un détail qui saute aux yeux lorsqu’on assiste à des matchs du championnat national guinéen de football, c’est bien l’absence notoire d’ambulances médicalisées dans les enceintes. Une triste réalité quand on sait les nombreux drames pouvant survenir lors d’une rencontre de football.
Entre blessures graves, malaises cardiaques, évanouissements, débordements… les risques sont nombreux. Minimiser ainsi l’importance d’ambulances médicalisées, dispositif impératif dans la sauvegarde de l’intégrité physique des acteurs, relèverait d’une dangereuse prise de risques. Les textes en vigueur qui régissent l’organisation des matchs de football au niveau de la Ligue guinéenne de Football professionnel l’exigent pourtant. Cela perdure-t-il par manque de rigueur des organisateurs ou faute de moyens ou encore par insuffisance du personnel médical ?
Pour trouver des réponses à ces questions, notre reporter s’est tourné vers la Ligue guinéenne de Football professionnel (LGFP), l’instance en charge de l’organisation des championnats de première et seconde divisions. Nous avons aussi échangé avec un responsable d’un club de Ligue 1 pour comprendre.
Les clubs manquent de moyens
Un responsable de club qui a souhaité garder l’anonymat pointe du doigt une Ligue moins généreuse en matière de subvention.
« Nous ne percevons que 40.000.000 GNF par saison. Comment voulez-vous qu’on gère le problème d’ambulance avec un tel montant ? Par exemple, la Ligue nous retire par exemple beaucoup d’argent avec cette histoire de cartons jaunes ou rouges. Ils nous disent qu’ils prendront cet argent pour régler le problème d’ambulance. Un carton rouge est payé à 1.000.000 GNF”, soutient-il.
Le tissu économique dans lequel évoluent les clubs de l’élite guinéenne n’est pas suffisamment solide pour leur permettre de réunir l’ensemble de la logistique nécessaire à leurs différentes prestations. Faute de moyens et en l’absence d’une véritable organisation de la part de la LGFP, les différents acteurs se contentent de colmater, faisant avec les moyens du bord.
« Les clubs n’ont pas assez de moyens. Avant, je vous signale que c’étaient les clubs qui prenaient en charge la Croix-Rouge, etc. Les petites dépenses surtout. Depuis quelques années, c’est la Ligue qui prend cet aspect en charge. Même les agents de la Croix-Rouge, qui vont au secours des joueurs qui sont blessés sur le terrain, leurs frais sont pris en charge par la Fédération Guinéenne de Football (FEGUIFOOT) et la Ligue. Donc, on continuera sur la même lancée pour voir dans quelle mesure la Fédération prendra en charge la question des ambulances médicalisées pendant les marches de championnat », espère le dirigeant sportif. Qui insiste sur le fait que : ‘’économiquement, nos clubs sont faibles. Pour l’instant, il n’est pas question de leur faire supporter la charge d’une ambulance », tranche notre interlocuteur.
La solution viendrait de la FEGUIFOOT
Ce quasi-désert médical dans les stades guinéens est palpable. Lucien Beindou Guilao, Président de la LGFP, bien conscient de la pertinence du sujet, explique comment nous en sommes arrivés-là. Il assure que des mesures ont déjà été prises par les décideurs pour y remédier.
« Ce que je peux vous dire, c’est que la FEGUIFOOT nous a déjà instruit de voir dans quelle mesure on pourrait mettre des ambulances dans les stades lors des matches. Parce que c’est quand même un facteur très important et pour l’athlète, comme vous l’avez dit, et pour le public en cas de problème. Donc, cette instruction nous a été donnée. Cela veut dire que la question a été étudiée par la Fédération. On était sur le mode opératoire. La Fédération a quand même souhaité que l’Association des médecins sportifs soit impliquée. C’est ce qu’on est en train de faire », explique M. Guilao.
Le président de la LGFP se fait d’ailleurs plus précis sur l’acquisition de ces ambulances. « Je peux vous dire qu’à partir des matches retours, la première journée des matches retours, il y aura des ambulances sur les stades pour les matches de ligue. On le fera aussi pour la Ligue 2, parce que c’est quand même des êtres humains qui jouent. On essaiera de le faire aussi pour la Coupe de la ligue », assure-t-il.
Les hôpitaux publics mis à contribution ?
Même si des ambulances étaient rendues disponibles pour les différentes rencontres de Ligue 1 et 2, il faudra résoudre l’équation des opérateurs que sont les médecins spécialisés dans le domaine du sport.
« L’autre aspect, dans le mode opératoire, ce n’est pas que nous allons acheter ou louer des ambulances. Il y a des ambulances un peu partout dans les hôpitaux aujourd’hui. Si le match se joue à Kamsar, l’hôpital de Kamsar met à disposition l’ambulance. Si ça se joue à Kaloum, il y a un hôpital. Il y a les sapeurs-pompiers qui ont des ambulances. De ce côté, on peut trouver sept ambulances. Donc, il y a des hôpitaux à Kamsar, il y en à Kankan, à Conakry, il y a l’hôpital sino-guinéen, Donka, Ignace Deen. Il y a les sapeurs-pompiers, qui ont des ambulances », insiste l’ancien international du football guinéen. Qui précise que ce manque d’ambulances dans les stades de football est lié à leur coût d’acquisition.
En attendant la concrétisation de cette promesse, les footballeurs professionnels locaux et leurs supporteurs sont livrés à eux-mêmes. En cas d’incidents sur le terrain ou dans les tribunes, le pire est à craindre. Faute d’équipements de réanimation et de moyens de transport adéquats et rapides vers une structure sanitaire.
Par ailleurs, se pose avec acuité les questions du nombre et la qualification des médecins sportifs en Guinée.
Les yeux sont rivés désormais sur les matchs retours pour voir les premières ambulances médicalisées dans les stades des Ligues 1 et 2.
Mohamed Béné Barry