Les marchés de Conakry sont généralement pris d’asaut par des citoyens à l’approche des fêtes. Qui pour des habits de fête, qui pour des denrées alimentaires. Objectif, passer une très bonne fête. Sauf que, cette année, à quelques heures de la fête de Ramadan, les marchés que nous avons squattés ne refoulent pas du monde. La rareté de certaines denrées et le pouvoir économique très faible des citoyens compliquent sérieusement la tâche à ces derniers.
Parmi les denrées très prisées à l’approche des fêtes, il y a la viande, le poisson et le poulet. Ils se retrouvent abondamment dans les assiettes le jour de la célébration de l’aïd El Fitr.
Nous nous sommes rendus dans deux marchés de Conakry : celui Taouyah et le marché de Broukiya, pour se faire une idée de l’affluence, mais surtout des prix.
Rencontré au marché de Taouyah, Thierno Ousmane Diallo, vendeur de poulet importé, est retranché derrière son frigo, bien rempli de poulets surgelés. Il hèle chaque passant devant son commerce, espérant avoir un éventuel client.
Heureux de me voir m’arrêter devant son frigo, pensant trouver enfin ce fameux client, le sourire de Ousmane cède vite la place à la disillusion, lorsqu’il a appris que je n’étais qu’un journaleux, bien décidé à le faire bavarder sur la vente de ses poulets.
Après les salamalecs d’usage, Ousmane s’est montré bien coopératif.
“Comme tu peux le voir, les gens ne se bousculent pas. De temps à autres, certains s’arrêtent pour acheter. Mais, on ne peut pas dire que c’est la grande affluence. Il y a eu des jours meilleurs. Un poulet se négocie à 35 000 GNF. Mais, j’ai espoir que les gens viendront”, implore à peine Thierno Ousmane Diallo, que nous laissons pour approcher un autre.
“Le poulet importé est moins cher, mais il faut reconnaître qu’il y a beaucoup de vendeurs aussi. Il y a une forte offre et certains ont des clients. Et si toi, tu n’en as pas, ça devient très difficile”, nous confie un vendeur installé non loin de Thierno Ousmane.
Le poulet du pays, quant à lui, se négocie entre 85 000 GNF, 90 000 GNF, voire 110 000 GNF, selon un vendeur qui veillait sur sa volaille.
On retrouve un peu plus loin, Mamadou Oury Diallo, boucher. Sur sa table et son crochet à viande, pas la moindre trace de viande. Que des couteaux et une machette. L’homme était très occupé à faire les comptes d’une journée qui aura été apparemment très fructueuse.
“Le kilo de viande se vend à 60 000 GNF. I faut reconnaître que le gouvernement a fourni beaucoup d’efforts pour permettre cela. Il n’y a plus de viande, tout a été vendu et j’espère que ça va continuer.
La viande est très consommée, mais le prix du kilo fait que c’est inaccessible pour beaucoup”, dira le boucher, toujours occupé à faire les comptes, quand on quittait les lieux.
Au marché de Broukiya, à Dixinn, le manque de poisson est visible. Les femmes vendeuses se plaignent de la rareté du poisson, et cela se fait sentir dans le panier de la ménagère.
“Le poisson coûte très cher. Ce n’est pas nous les responsables de cette cherté. Là où nous prenons le poisson, les prix augmentent à tout moment. Quand vous y ajoutez le transport vers le marché et les frais de conservation au frigo, ça nous coûte une fortune. Le poisson communement appelé « Yèkhè kharé » on ne le trouve pas. Les autres poissons se négocient entre 60 000 GNF et 160 000GNF. On fait de notre mieux pour aider nos clients, mais ce n’est pas facile”, nous confie Kadiatou Touré, vendeuse de poisson.
“Le poisson coûte très cher et il n’y a pas de poisson. Il faut dépenser une fortune pour avoir un bon poisson. On peut te vendre deux gros poissons à plus de 150 000 GNF. Le gouvernement doit nous aider, sinon c’est très difficile en ce moment”, lance Djenabou Diallo, ménagère.
Se procurer certaines denrées aujourd’hui est devenu un véritable casse-tête pour les consommateurs. Pour un pays aussi riche que la Guinée, beaucoup ne comprennent pas pourquoi tant de difficultés à remplir son assiette. Les décideurs sont requis pour travailler à davantage alléger le panier de la ménagère.
Mohamed Béné Barry