L’enquête sur les infirmeries au sein des établissements scolaires, publiée dans nos colonnes la semaine dernière, nous a permis de mettre le doigt sur certaines insuffisances de la vie scolaire en Guinée. Des constats faits suite à nos échanges avec des acteurs de l’école. L’un d’entre eux a particulièrement attiré notre attention. Il s’agit du carnet de visite médicale. Autrefois incontournable dans les écoles, ce document pédagogique, très peu connu de nos jours, pourrait pourtant être d’une grande utilité dans l’accompagnement et la prise en charge médicale des élèves.
M. Younoussa Camara, ancient cadre en service à la Direction de l’éducation de la ville de Conakry, est celui qui nous avait parlé de ce document dans notre entretien sur les infirmeries scolaires qui n’existent d’ailleurs quasiment pas dans les écoles guinéennes.
Ce document pédagogique, selon M. Camara, devrait être obligatoire dans toutes les écoles, afin de se faire une idée sur la santé, le suivi et les antécédents médicaux des élèves.
Nous sommes retournés voir le cadre pour réceullir plus d’informations sur ce fameux carnet de visite.
Il a bien accepté de nous rencontrer pour nous expliquer l’importance d’un tel document qui ferait office de bulletin de santé pour les élèves.
Pour M. Camara, ce document devrait être obligatoire pour tous les élèves, histoire de permettre aux responsables des établissements scolaires d’avoir des avis très précis sur l’état de santé de chaque enfant.
Comment définir le carnet de visite?
Le carnet de visite médicale d’élève est un document officiel utilisé dans le cadre du suivi médical des élèves en milieu scolaire. Il permet d’enregistrer les examens médicaux réalisés à l’école ou dans un cadre médical lié à la scolarité.
Responsabilité des Directions d’écoles
L’école dans sa fonction régalienne de transmetteuse du savoir, de formatrice mais surtout de constructrice, doit aussi se prévaloir d’être garante de la santé de chaque individu. Voilà pourquoi M. Younoussa Camara pense que le sujet sur le carnet de visite devrait être non négociable.
“Le carnet de visite, c’est un document sanitaire que chaque direction d’école doit fournir, doit chercher, doit intégrer parmi les documents pédagogiques. C’est-à-dire que si un enfant tombe malade à l’école, au lieu d’informer les parents, on lui remet le carnet de visite, et il va avec à l’hôpital pour des soins. C’est extrêmement important. Parce que le plus souvent, si les écoles travaillent ainsi, quand un enfant tombe malade, ça leur évite de déranger les parents en les faisant venir chercher l’enfant à l’école. Ça fait partie des responsabilités de la direction de l’école”, explique M. Camara.
Par ailleurs, le carnet de visite permet aux cadres de la direction de veiller advantage sur l’état de santé des enfants. Grâce donc à ce document, relève-t-il, les enfants ne sont pas en reste, en ce qui concerne leur suivi sanitaire.
“C’est un carnet de suivi qui permet à l’école de connaître l’état de santé de l’enfant. Quand l’enfant tombe malade, muni de son carnet, on lui prescrit des produits à l’hôpital. Si l’école n’est pas en mesure de payer l’ordonnance, on fait appel aux parents”, ajoute ce connaisseur de la vie scolaire.
Toutefois, M. Camara regrette que beuacoup de chefs d’établissement banalisent ce document. Ce n’est pas une obligation, dit-il, mais cela fait partie de leurs prérogatives.
Utile, mais porté disparu dans le milieu scolaire guinéen
Si le carnet de visite existaient sans exception dans toutes les écoles (publiques et privées), M. Camara estime qu’il aurait efficacement servi de moyen de suivi et de maintien des enfants à l’école.
“Dans les conditions normales, au niveau de toutes les directions, le carnet de visite médicale doit exister. Ça doit faire partie des documents pédagogiques. Ça prouve que la direction veille beaucoup sur l’état de santé des enfants. Ainsi, si l’enfant tombe malade, on ne peut pas le laisser partir à la maison. Il permet donc de maintenir l’enfant à l’école. Parce qu’il y a certains enfants, quand ils se plaignent d’un mal, on leur dit d’aller automatiquement à la maison. Et c’est pour ne plus revenir après. Alors qu’une simple consultation médicale accompagnée de quelques produits lui permettent de mieux se sentir. Du coup, il revient à l’école pour suivre le reste des cours. Donc, il peut continuer, si la maladie n’est pas tellement grave. Alors que s’il s’agit seulement de dire à l’enfant d’aller à la maison, les parents vont s’occuper de toi, il ne revient plus », relève-t-il.
Le carnet de visite existait autrefois, mais malheureusement, la présence de ce document s’est effritée avec le temps dans le système scolaire guinéen.
“Pour certains établissements, peut-être, ça existe. Il y a des chefs d’établissement qui sont effectivement responsables. Il y a une question de conscience aussi. En tout cas, normalement, ça doit exister”, persiste et signe M. Younoussa Camara, ancien cadre à la Direction de l’éducation de la ville de Conakry.
Un lien entre l’école, les parents et l’hôpital
Un médecin que nous avons rencontré, nous a édifié sur ce que devrait être le carnet de visite médicale scolaire et son contenu. Docteur Ibrahima Sory Diallo nous explique : “Ce carnet n’est pas trop différent des autres carnets médicaux. Il devrait contenir les informations personnelles des élèves, les motifs des examens médicaux de l’enfant, les notes du médecin traitant par exemple, mais aussi les recommandations et les antécédents médicaux de l’enfant. Mais cela devrait se faire avec la collaboration des parents, bien entendu”, nous a confié ce professionnel de la santé, en service dans plusieurs structures sanitaires de Conakry.
Dr Ibrahima Sory Diallo assure que ce dossier médical pourrait être d’une grande aide dans les rapports entre les parents, les responsables d’écoles et les médecins dans le cadre du suivi des enfants.
Comme on le voit, la question du carnet de santé scolaire met à nu l’insuffisance de la prise en compte de la promotion de la santé dans le milieu éducatif guinéen.
Une situation qui devrait interpeller les décideurs afin d’améliorer le cadre de vie scolaire de millions d’enfants de notre pays.
Mohamed Béné Barry