De Coyah à Dubréka, en passant par la périphérie de Conakry, un phénomène inquiétant prend de l’ampleur : la prolifération des constructions sur les flancs du mont Kakoulima. Ce relief autrefois couvert de végétation dense est aujourd’hui grignoté mètre par mètre par une urbanisation incontrôlée. Des maisons de toutes tailles ,de modestes habitations aux immeubles à plusieurs niveaux y poussent littéralement comme des champignons, défiant les règles élémentaires de sécurité.
Un danger visible, mais ignoré. Il suffit d’emprunter la route nationale pour constater l’ampleur du phénomène : des bâtis accrochés aux pentes raides, certains creusant même sous les pieds de la montagne, en violation flagrante des normes d’urbanisme. Les distances minimales de sécurité oubliées. Les risques de glissements de terrain, mnimisés. Pourtant, les dangers sont bien réels, surtout en saison hivernale où les pluies diluviennes fragilisent le sol à travers de fortes eaux de ruissellemnt.
Des observateurs environnementaux et des géotechniciens tirent régulièrement la sonnette d’alarme. Le scénario d’un effondrement massif, à l’image de ce qui s’est produit dans d’autres pays tel que la Sierra Leone , n’est pas exclu. Et dans un contexte de forte densité démographique, les conséquences seraient dramatiques.
Rencontrés sur les lieux, plusieurs occupants affirment être installés « sur des parcelles assainies ». Comprenez : des terres issues de lotissements. Mais qui a loti ?
Selon une enquête menée auprès de certains cadres des services de l’habitat à Coyah et Dubréka, ces lotissements n’auraient aucun fondement administratif clair. Ce sont des opérations d’aménagement privées, conduites par des individus ou groupes se réclamant « aménagistes », qui morcellent, tracent, puis vendent les parcelles aux citoyens… sans approbation ni étude préalable des risques.
Plus surprenant encore, ces constructions avancent au vu et au su de tous. Aucun permis d’habiter, aucun plan d’urbanisme en zone montagneuse n’autorise de telles implantations. Pourtant, aucun bulldozer, aucune mise en garde, aucune mesure de suspension n’est jusque-là prise. Le silence des services techniques, des autorités locales et même des responsables de la protection civile interroge. Est-ce une forme de complicité tacite ou une impuissance totale face à la pression foncière ?
L’impact environnemental est déjà visible : déforestation, érosion accélérée, altération des nappes phréatiques. Et lorsque les montagnes s’effondrent, ce sont toujours les plus vulnérables qui paient le prix fort. Une seule saison des pluies anormalement intense pourrait suffire pour transformer ces habitations de fortune en pièges mortels.
À qui la faute ? Et surtout, qui agira avant le drame ?
Par Ibrahima Sory Kandja Bangoura