La junte militaire au pouvoir au Mali a annoncé, ce mercredi, la suspension « jusqu’à nouvel ordre » des activités des partis politiques et des associations à caractère politique, invoquant une « raison d’ordre public ». Cette décision intervient alors qu’une nouvelle coalition d’opposition appelle à la mobilisation contre un possible démantèlement de ces structures et pour un retour à l’ordre constitutionnel.
Le décret, signé par le chef de la junte, le général Assimi Goïta, et diffusé à la radiotélévision nationale, précise que cette suspension concerne l’ensemble du territoire national et s’étend à toute organisation revendiquant un caractère politique.
Cette mesure s’inscrit dans une série de restrictions visant les mouvements d’opposition depuis l’arrivée au pouvoir de la junte à la suite des coups d’État de 2020 et 2021. Le 30 avril, les autorités avaient déjà abrogé la loi encadrant le fonctionnement des partis politiques, un acte perçu par certains juristes comme un prélude à leur dissolution. Face à cette menace, une coalition regroupant une centaine de partis s’est constituée, exigeant un retour à l’ordre constitutionnel au plus tard le 31 décembre 2025. Cette coalition a réussi à mobiliser plusieurs centaines de personnes lors d’une manifestation à Bamako, une mobilisation rare sous le régime militaire.
La répression contre les partis politiques s’accompagne d’une volonté affichée par le régime de restructurer le paysage politique malien. Fin avril, une concertation nationale, boycottée par l’opposition, avait recommandé la suppression pure et simple des partis politiques.
Elle avait également proposé de proclamer le général Goïta président de la République pour un mandat de cinq ans renouvelable, sans élection. Depuis les coups d’État, l’opposition malienne a subi des mesures de rétorsion, des poursuites judiciaires et la dissolution de plusieurs organisations, affaiblissant ainsi toute contestation.
Malgré les revendications populaires en faveur de la démocratie et de la liberté d’expression, la junte continue de restreindre l’espace civique. Pourtant, la Constitution malienne de 1992, réaffirmée en 2023, garantit le multipartisme ainsi que les libertés d’expression et d’association. Cette situation se déroule dans un contexte de crise sécuritaire majeure, le Mali étant en proie depuis 2012 à des violences perpétrées par des groupes djihadistes affiliés à Al-Qaïda et à l’État islamique, ainsi que par des conflits communautaires.
Mohamed Béné Barry